Le 4 avril dernier, le grand Getatchew Mekurya laissait derrière lui une empreinte indélébile dans le Jazz Ethiopien. Retour sur la carrière de l’enfant de Yifat.

Né le 14 mars 1935 à Yifat dans la province du Shewa en Ethiopie, Getatchew Mekurya s’initia tout d’abord aux instruments à corde traditionaux éthiopiens comme le krar (une sorte de lyre), le mèssengo (un dérivé de la vièle) ou le masinqo. Mais très vite, il se tourna vers la clarinette et surtout le saxophone. Ces premières approches de la musique feront dire à certains qu’il jouait du saxophone comme il manipulait le masinqo. En 1949, dès l’âge de 13 ans, il fit ses débuts de musiciens au sein de l’orchestre d’Addis-Abeba.

En 1965, Getatchew Mekurya intègre le fameux Police Orchestra, groupe composé d’Alèmayèhu Eshèté et Ayaléw Mèsfin, connu notamment pour sa collaboration avec la grande chanteuse Hirut Bekele. C’est à ce moment-là qu’il développa son style « shellala », sorte de dérivé instrumental du chant guerrier éthiopien du même nom. En 1970, il dévoile son premier album, « Negus Of Ethiopian Sax » sur le label Philips Ethiopia. Cet objet sera réédité en 2003, via la compilation « Éthiopiques 14 », et lui apportera toute la notoriété qu’il mérite. En 1972, Mekurya sortira deux singles, toujours chez Philips Ethiopia, Aha Gedawo et Antchi Hoye, morceau que l’on retrouvera sur la compilation « Éthiopiques ».

Très attaché à ses racines, le jazzman éthiopien ne quittera jamais sa ville d’Adis-Abeba. Toute sa carrière sera dédiée à mettre en avant la culture de son pays qu’il aimait tant. De 1974 à 1994, il exercera en tant que professeur de musique dans l’orchestre de police de la capitale éthiopienne. Il restera ainsi dans l’ombre pendant des années jusqu’à la sortie d' »Ethiopiques » par le label Buda Musique en 2003. Cette compilation, reconnu comme un must-have de tout passionné du genre, révélera enfin à la face du monde le talent de cet artiste qui n’a rien à envier aux plus grands du mouvement Jazz.

En 2004, Mekurya entamera une collaboration avec le groupe de post-punk hollandais The Ex. Ensemble, ils produiront deux albums en 2006 et 2012 sur le label spécialisé dans les musiques ethniques et d’improvisation, Terp Records. Les membres du groupe batave étaient venus à sa rencontre en Ethiopie, suite aux bons conseils de Francis Falceto, spécialiste des musiques du monde et en particulier de la scène éthiopienne. C’est d’ailleurs lui qui réédita « Negus of Ethiopian Sax », l’album oublié du génie éthiopien qui lança le free jazz 10 ans avant l’avènement du free jazz. La collaboration entre The Ex et Mekyura débuta avec un premier opus, Moa Anbessa, qui les propulsa sur les scènes d’une quinzaine de pays pendant près de 8 ans. En France, en Belgique, aux Pays-Bas et jusqu’aux États-Unis, ils prirent d’assaut le public armés de leurs sonorités vibrantes, contemporaines et tribales. En 2012 paru le dernier projet de l’éthiopien, Y’Anbessaw Tezeta.

À l’âge de 81 ans, le 4 avril dernier, Getatchew Mekurya s’est éteint.

« Le Negus était l’un des derniers vieux lions de la musique éthiopienne. Avec lui, se referme une page d’un âge d’or qui n’a pas fini de révéler ses trésors. »

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